11ème cuirassiers – JOURNAL DE MARCHE – Août 44

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JOURNAL DE MARCHE DU 11è REGIMENT DE CUIRASSIERS

Août 1944

1er Août 1944

Installation du P.C. dans la nature à l’abri d’un rocher en surplomb.

Des patrouilles sont envoyées sur Saint-Laurent : occupé par une centaine d’Allemands; sur Bouvante-le-Bas où 150 Allemands campent mais doivent partir demain; sur Lente : R.A.S.; sur Faravellon où les Allemands viennent de tout piller.

2 Août 1944

Toujours sans nouvelle des deux escadrons Bagnaud et Roland.

Une patrouille part par Lente, La Machine, La Sapine, Loscence, la Roche des Arnauds et retour. Des traces de Bagnaud sont trouvées à Loscence et aux Arnauds. Pas de coups de feu entendus. Un câble téléphonique existe entre Lente et La Machine.

A Bouvante-le-Haut 600 Allemands sont arrivés venant du Musan (?). Ils doivent remonter à Lente; ils ont deux pièces de 77 dirigées, l’une sur le col de la Bataille, l’autre sur Comblezine.

A Saint-Jean R.A.S.

Vers 14h30, environ 30 chevaux attelés, 60 hommes de troupe et des civils sont passés à Saint-Martin venant de Léoncel vers Bouvante-le-Haut. Une ligne téléphonique est installée entre le Pionnier et Cimpalon (?). Les Allemands qui à 14h30 passèrent à Saint Martin le Colonel auraient déclaré qu’ils remontaient au Pionnier pour refaire toute la forêt de Lente comme à l’aller et vont redescendre à Grenoble.

3 Août 1944

Le ravitaillement est très pénible. Les paysans de la plaine sont terrorisés par les Allemands et sont très réticents pour nous.

à 11h 2 motos, 1 car, 2 V.L., 2 camions montent de Saint-Martin au Pionnier.

à 12h Une colonne d’au moins 500 Allemands (alpenjügers) venant du S.O. passe par le col de la Croix et monte au Pionnier. Un convoi de 6 mulets, 7 voitures, 2 motos, 4 cyclistes, 20 à 25 hommes d’escorte viennent de Léoncel et montent au Pionnier. Une patrouille venant du Musan traverse Tamée.

à 15h30 La ferme du Pionnier brûle; deux autres feux au Pionnier.

à 17h Une patrouille est envoyée sur le col de Taillebourse; elle revient en apportant le renseignement que le bataillon d’infanterie alpine s’est dirigé sur Taillebourse et ensuite sur Loscence (?).

Un papier du Commandant Hervieux arrive le 4. Il y déplore l’ordre de Bayard expédiant les deux escadrons Bagnaud et Roland dans la nature.

Il y précise les réorganisations à faire et donne quelques renseignements sur 22 hommes de Bagnaud.

4 Août 1944

Des patrouilles sont envoyées sur le carrefour des 4 Routes, sur le col du Pionnier, sur le carrefour Yves, sur Loscence, sur le col de l’Echarasson; Rien à signaler sauf les traces du bataillon qui passe en direction de Loscence.

Il semble qu’il y ait eu un regroupement des Allemands à Loscence/

à 11h50 Les Allemands sont chez Ferlon où ils auraient cantonné. Ils brûlent la grange et la ferme Chabert où ils ont fusillé trois ouvriers agricoles.

L’ordre d’alerte est aussitôt donné.

R.A.S. pour le restant de la journée, sauf une liaison de Seguin qui annonce sa disparition depuis deux jours.

Un accrochage a eu lieu le 29 Juillet et il y aurait dix disparus. On est sans nouvelle du peloton Gaston.

A Saint-Jean, R.A.S., Saint-Thomas est libre, Saint-Laurent est libre. Les Allemands sont repliés à Saint-Nazaire.

La ligne téléphonique Oriol – Saint-Jean a été enlevée le 3 à leur départ.

Les Allemands, en passant dans les fermes promettent de tout brûler et disent que tous les “terroristes” sont morts.

Il est à remarquer que la patrouille qui recherche Bagnaud s’est fait tirer dessus au col du Maupas.

A Bouvante, les occupants sont partis pour le Pionnier.

Deux bûcherons de Malatrat arrêtés par les Allemands pour avoir reçu des dissidents chez eux ont été conduits à Vassieux, interrogés et défendus par un interprète alsacien; relâchés et demandant un laisser-passer pour être libres de rentrer chez eux, les Allemands leur ont déclaré que c’était inutile car la route était libre.

Reconnu exact par une patrouille envoyée aussitôt du P.C. à Taillebourse.

Une liaison du Capitaine Fayard arrive à 16 heures qui précise sa position (sources de la Lyonne); elle est venue par le col de la Rama, les 4 Routes, Pellandré.

R.A.S. sur la route.

Les occupants de Vassieux (1.200 environ) sont partis sur Die. Un C.R. du Capitaine Fayard donne pas mal de renseignements; il est actuellement avec le Capitaine Duclos et 35 hommes.

Toujours pas de nouvelle de Roland.

5 Août 1944

Le ravitaillement est toujours maigre malgré nos efforts. Le plus dur est de le monter à nos emplacements. Une note de service va arranger tout cela.

Envoi de patrouille sur le col de Taillebourse, sur le carrefour Yves, sur la Machine, à la recherche de Roland et de Bagnaud, sur le col de Gaudissard, sur la ferme du Mandement, sur le P.C.hervieux où l’Aspirant Louis Rose porte un message urgent pour Alger.

R.A.S. partout; une fiche de signalisation est trouvée, elle est aussitôt enlevée.

Un papier du Commandant Legrand dit que T.V.B. est chez lui et qu’il a même du vin. Il ne connaît pas son bonheur, nous qui buvons à peine l’eau croupie d’une citerne presque à sec. La dysenterie commence d’apparaître. Le Capitaine Paquebot dans sa grotte refuge a toujours un moral magnifique; le Capitaine Modot va le voir demain.

Sans aucune nouvelle officielle de l’hôpital de Saint-Martin réfugié dans la grotte de la Luire. Il paraît que les Allemands l’ont découvert et ont tué les blessés et les malades. On attend confirmation de cette nouvelle atrocité bien digne des nazis.

6 Août 1944

Patrouilles sur le col du Pionnier, sur l’hôtel Faravellon, sur Saint-Laurent où on va chercher un peu de ravitaillement, sur le domaine de Lente où la patrouille trouve la femme de la ferme de Lente; c’est l’ancien P.C. de Roland. La ferme est brûlée, son bétail enlevé, son mari fusillé. Elle déclare que les gardes forestier arrêtés et relâches par les nazis ont fait une battue et ont retrouvé une centaine de corps mutilés et martyrisés à 300 mètres de la ferme de Lente. Les Nord-africains de Bagnaud seraient tués; d’autre part tous les renseignements sur Roland et son escadron indiquent qu’ils sont prisonniers des Allemands.

R.A.S. à Léoncel, col de la Bataille, Estraillers, Saint-Jean.

Léger accrochage à Tamée entre les hommes de Legrand et ceux du Lieutenant Arnaud.

Le corps de Perriolat Maurice est découvert vers Ambel. Enterré sur place. On ignore à quelle unité il appartient.

A Saint-Jean, 3 camions venant de Choranche et Pont-en-Royans et une cinquantaine d’Allemands en vélo sont arrivés et doivent y passer la nuit.

Vers 16 heures, une attaque est dirigée sur des hommes de Grange qui cantonnent vers la ferme brûlée de Terbu : 3 blessés, 2 morts.

Les officiers Allemands demandent à un gamin le chemin de Gauthier. L’attaque de nos positions serait-elle pour demain ? Les précautions d’usage sont prises et nous dormons d’un œil.

7 Août 1944

Dès 6h Nous allons nous installer dans les bois à flanc de montagne en laissant des postes aux entrées du Pas.

A 8h 3 camions pleins sont passés à Oriol avec une voiture blindée vers Léoncel. Une ligne téléphonique est branchée pour Léoncel, Oriol, Saint-Jean. Les Allemands sont revenus à Saint-Nazaire.

Une cinquantaine d’Allemands en vélo sont passés à 7heures, direction Léoncel.

R.A.S. à Saint-Laurent. A Saint-Jean tout est fermé car les Allemands pillent et volent tout.

R.A.S. à Bouvante-le-Haut et Bouvante-le-Bas.

Un voyageur venant de Romans à Oriol donne les renseignements suivants : à Romans les occupants sont calmes et gardent la caserne très peu nombreux; la ville est calme. A Saint-Nazaire, il n’y a pas eu réoccupation mais simplement cantonnement pour la nuit. Saint-Thomas, Saint-Jean, Oriol, Saint-Martin R.A.S.

Les voies ferrées de la vallée du Rhône ont été durement bombardées par les Alliés.

Aujourd’hui sont récupérés Gaston et 15 hommes, et 14 hommes de Grange., de même les reporters Forestier et Cinemac . Ils viennent de chez Fayard où tout va bien; il regroupe son unité.

8 Août 1944

R.A.S. dans la nuit.

3 camions redescendent à vide de Léoncel vers Saint-Jean. On se bat à Léoncel.

Bagnaud revient avec 60 hommes. Il apporte des renseignements très intéressants sur les atrocités des Allemands sur le plateau du Vercors. Aucune loi n’a été respectée et ce sont de véritables brutes sauvages. Hommes pendus, les yeux crevés, la langue arrachée, poitrines défoncées, écartèlements sont choses courantes partout. La grotte hôpital a été découverte, tous les docteurs et malades ont été tués, les infirmières ont été emmenées en camion sur Grenoble. Tous les établissements publics sont brûlés (même les écoles).

2.000 têtes de bétail ont été embarquées, seule est laissée une vache par ferme. Des mères de famille sont frappées à coups de pied dans le ventre (Saint-Agnan) ou fusillées et leurs enfants morts de faim (Vassieux). Les femmes sont pourchassées pour servir à la troupe.

Les listes du Service Social (école de Saint-Martin) sont entre les mains des occupants qui ainsi connaissent les noms des familles de membres de la dissidence (grosse faute du Comité de Libération qui n’en a pas assuré la destruction).

Nous avons la confirmation de la mort du Capitaine Roland; son corps a été vu par l’Aspirant Gaston de son escadron. Le Capitaine fut certainement torturé car ses deux bras sont tuméfiés et son cadavre assez abîmé. Plusieurs militaires de son escadron sont disséminés dans la région de Montuez.

9 Août 1944

Un C.R. des postes de guet signale que des signaux ont été échangés cette nuit entre La Rochette la Vallée et le Musan. Enquête faite : résultat néant. Cela rappelle étrangement le Rousset et ses signaux (??).

Des dispositions sont prises pour cette nuit.

De Valence il nous vient les tuyaux suivants : dans la ville beaucoup de troupes de mercenaires (Mongols, Russes), un régiment d’infanterie et un régiment d’artillerie sont arrivés il y a 2 ou 3 jours. Les Allemands raflent tous les moyens de transport et recherchent des habits civils à prix d’or. Aucune circulation de trains. A Chabeuil ils emballent le matériel du terrain d’aviation dans des coucous, et l’impression est qu’ils ont l’intention d’évacuer. La Milice monte la garde derrière des barbelés dans la ville. Aucun dégât dans cette ville mais les Allemands font sauter les routes La Vacherie – Valence, et Saint-Jean – Nyons (?). Leur route de retraite serait prévue par Oriol – Saint-Jean et la vallée de la Bourne.

Nos avons des nouvelles du Sous-Lieutenant Honnart bloqué à Romans depuis le début des opérations.

Nous le faisons revenir d’urgence. Il s’occupera avec Monsieur Boiron du ravitaillement qui va mal, par manque de compréhension de beaucoup de gens. Honnart aurait 300 hommes armés qui travailleraient à Romans contre la Milice; ils en descendraient un ou deux par nuit.

Un ordre est envoyé à l’Aspirant Seguin pour rejoindre avec ses hommes; il est à La Chaize.

Nous restons toujours cachés dans les bois car une offensive de l’ennemi est toujours possible. Un poste fixe est placé sur l’arête rocheuse du Pas de l’Echelle; il voit la plaine du Nord au Sud.

Le chemin est gardé par un poste pour interdire toute circulation et surveiller la direction de Gauthier.

Un mot est envoyé au Capitaine Fayard pour qu’il nous envoie la situation de son unité. Les escadrons se réorganisent, petit à petit les effectifs épars dans la forêt ou la plaine rejoignent et l’ordre est donné de constituer immédiatement des pelotons de guérilla pour l’action à venir.

10 Août 1944

R.A.S. la nuit sauf les signaux qui semblent provenir du plateau et se dirigent sur la vallée et le Musan.

Les Allemands ont quitté Tamée et ils avaient un petit poste (?). Hier à 16 heures un “chleuh) se trouvait tout seul sur la route de Bouvante-le-Bas revenant de chez Gerin et allant vers Saint-Jean (??).

Seguin rejoint seul vers 13 heures. Ordre lui est donné de regrouper son unité et de se rabattre le plus tôt possible sur notre lieu de stationnement.

Un C.R. du Lieutenant Sabatier rend compte qu’il est sans liaison avec le Commandant Legrand depuis deux jours; on se bat au Chaffal et sur Escoulins; la Vacherie est brûlée, le col de Tourniol sauté.

A Saint-Jean R.A.S.

A Saint-Nazaire évacué, une fosse commune contenant plus de 150 corps est découverte.

Les Mongols et les nazis ont quitté hostun et Barbières.

A Tamée, il y a deux postes de pionniers allemands.

Le second maître Simon (du P.C.) est avec Sabatier. Il avait disparu dans le voyage Lente – Pellandré.

Raphaël de l’escadron Roland vient au P.C. avec une lettre d’Honnart et un camion de ravitaillement à l’Echarasson. Ordre lui est donné de regrouper et de rejoindre avant dimanche.

Les Allemands ont partout l’air de remonter vers le Nord. Ils sont attaqués sans cesse par des guérillas.

D’après des officiers Allemands descendant du Vercors, les opérations n’ont pas été payantes et ils auraient 1.000 tués. Ils refluent sur Lyon et Macon.

Le petit Paul qui a convoyé le ravitaillement va nous faire monter un radio. Tout a l’air de s’arranger.

Honnart est averti par une lettre du Commandant, d’avoir à envoyer ici tout ce dont on peut avoir besoin, et les hommes qu’il a sous la main.

Arrivée de la liaison de Mad. Beck. La flotte alliée serait depuis trois jours devant Toulon, et il est fort possible que quelque grand évènement se produise avant lundi.

Le renseignement suivant nous arrive :

– à Léoncel, Tamée, il n’ y a plus d’Allemands. Ce matin ils ont encore descendu du bétail; ils ont couché à Saint-Jean, sont repartis pour Saint-Laurent où ils ont fait une pause et semblent se diriger sur Grenoble par Villard.

On institue une ronde d’un officier et deux hommes pour contrôler les postes de garde.

R.A.S. dans la nuit.

11 Août 1944

Reçu dès 8 heures un message de Londres transmis par le Commandant Chabert; son P.C. part pour les environs de Presles.

Le docteur Jean-Pierre a la confirmation par Valette (gestionnaire de l’hôpital) du massacre total des occupants de la grotte de la Luire : docteur, malades et infirmières sont tous fusillés; la famille du docteur Ganimède, les docteurs Ulman, Ferrier, etc …. furent fusillés devant la grotte, les malades massacrés (y compris le lieutenant américain); les infirmières ont été emmenées d’abord au Rousset puis ramenées vers Saint-Agnan où après avoir été martyrisées et violentées, furent fusillées. Des tombes à côté de flaques de sang et de vêtements féminins attestent du fait. Les paysans de la région ont enterré les victimes (environ 40); il semble que seul le personnel auxiliaire ait réussi à se sauver et se trouverait à Saint-Jean.

Le ravitaillement s’améliore nettement, aussi le moral de tous est fort optimiste.

Vers 21h30 le Sous-Lieutenant Freyssinat vient rendre compte de ce que ses hommes sont prêts et qu’ils rejoindront à partir de demain.

Toute la soirée et la nuit, de nombreuses détonations assez lointaines (aviation alliée ou destructions allemandes)?.

12 Août 1944

Visite à 9 heures du Lieutenant Humbert qui vient en liaison pour le Capitaine Fayard. Celui-ci n’a pas été touché par notre dernier ordre le concernant (du 9 Août).

Cet agent de liaison repart avec l’ordre formel pour le Capitaine Fayard de regrouper une compagnie de 110 hommes, constituée en sections de guérilla et de rejoindre immédiatement Bouvante-le-Bas avec cette unité. Il se trouve actuellement à la ferme Pina avec 30 à 40 hommes.

Le Commandant Chabert contacté pour avoir un radio refuse d’en donner un et refuse en outre de transmettre les messages en code (il y avait 14 radios sur le Vercors ??). Les escadrons regroupent leurs armes et munitions; les pelotons de guérilla sont constitués.

L’adjudant-chef Valère (service auto) arrive à 13h30; il apporte des nouvelles réconfortantes et contrôlées qui démolissent les racontars sur l’hôpital de Saint-Martin. Un papier du docteur Ganimède lui-même donne des détails succincts; les infirmières sont à Lyon, emprisonnées.

L’Aspirant Vilchèze revient d’une mission sur le plateau. 16 jeunes et 6 autres personnes ont été fusillés à La Chapelle; l’institutrice des Chabottes a été fusillée. Tout est pillé. Il paraît que le Commandant Lang (Anglais) aurait été fusillé ?;

Rien, sauf l’hôpital et l’école n’a brûlé à Saint-Martin. Le Sous-Lieutenant Philippe a été tué à Vassieux avec 14 hommes (Dr. Guérin).

Le Sous-Lieutenant Freyssinat rejoint avec 20 hommes qu’il a récupérés. Le Capitaine Modot et le m.d.l. Marmoud descendent à la ferme Brun contacter la liaison de l’aumônier P. qui vient de la zone du Commandant Legrand. R.A.S. la nuit si ce n’est un avion qui passe très bas vers 3 heures (anglais ?).

13 Août 1944

On nous annonce que l’Aspirant Perrier a fait de son propre chef, entraîné par les évènements, un coup magnifique à Orange; il doit ramener 11 officiers Allemands prisonniers.

Le Sous-Lieutenant Honnart arrive et avec lui toutes les questions de ravitaillement sont réglées.

Le Commandant Thivollet décide de passer à l’action.

L’Aspirant Seguin envoie un C.R. disant qu’il va rejoindre avec 20 à 22 hommes demain.

Une liaison du Commandant Legrand apporte un papier du 11 qui est en contradiction avec les ordres du Général Koenig puisque l’action ne doit être déclanchée qu’au reçu des télégrammes spéciaux.

C’était pour cette raison qu’en attendant ces messages, le Commandant avait décidé de descendre dans la plaine pour être à pied d’œuvre le moment venu, d’où ordre de mouvement.

Après 25 km d’une marche sans histoire par Saint-Jean, Saint-Thomas, La Motte-Fanjas et Saint-Nazaire, nous arrivons à La Baume d’Hostun vers 4h30. Nous campons sur place (au Château).

14 Août 1944

La journée se passe à se préparer pour l’action future.

L’Aspirant Raymond en mission de ravitaillement ne revient pas à l’heure fixée et les Allemands sont signalés à Saint-Laurent. Il rentre à 22h30 et nous fournit un C.R.

A 19h30 les messages d’action passent tous les quatre. Aussitôt les ordres sont donnés pour que l’action de guérilla se déclanche. On envoie :

1 peloton de guérilla du 1er escadron dans la région des Massicotiers sur la N 531 (Lieutenant Vigne),

1 peloton de guérilla du 2ème escadron dans la région de Saint-Lattier sur la N 92 (sous le commandement du Sous-Lieutenant Freyssinat,

1 peloton de guérilla du 4ème escadron dans la région de Peyrins sur la N 538 (Lieutenant Grange),

1 peloton de guérilla du 5ème escadron sur la route entre Saint-Nazaire et Saint-Jean vers la Motte-Fanjas (Bagnaud).

Pour tous, la mission est d’attaquer les convois légers ennemis, de ramasser le matériel ennemi, de camoufler les traces, le plus possible, de ne pas se laisser accrocher dans l’action et de disparaître aussitôt. Les dispositifs doivent être mis en place pour le 15 Août à 5h30.

L’embuscade doit durer toute la journée et le retour est prévu le 15 Août à partir de la tombée de la nuit par des itinéraires détournés.

Les pelotons partent dans la nuit.

15 Août 1944

Monsieur Boiron et Honnart viennent nous rendre compte où en est le ravitaillement; tout va bien de ce côté.

Petit Paul nous apporte un renseignement important relatif à la transmission d’un ordre de l’Aspirant André le 23 Juillet; enquête à faire plus tard et sanction à prendre.

Le Sous-Lieutenant Freyssinat en embuscade du côté de Saint-Lattier rend compte que le secret des positions n’est pas gardé par suite du bavardage inconsidéré des paysans et que par suite l’emplacement des embuscades futures devra être fait en civil de jour et en vélo de façon à ce que le peloton arrive de nuit sur un terrain connu et repéré d’avance; cette proposition est adoptée. Les Lieutenants Geo et Raoul de Romans viennent comme d’habitude faire leur liaison hebdomadaire; les actions et mouvements de leurs troupes sont coordonnées avec les nôtres de façon à ne pas se gêner mutuellement dans l’action entreprise.

Ils nous indiquent un coup de main à faire sur un train de munitions et de matériel d’aviation à Saint-Marcel. Les renseignements nécessaires vont être pris.

L’Aspirant Gorille resté en poste curseur à La Rochette envoie un C.R. où tout va bien. Les unités récupèrent leurs dernières armes cachées. Les Allemands occupent toujours le Plateau par petits postes et patrouilles venant probablement de Villard-de Lans.

A partir de la tombée de la nuit nos pelotons de guérilla rentrent les uns après les autres après une vaine attente de toute la journée; seuls des camions et véhicules des F.F.I. circulent sur les routes.

Quelques renseignements sont rapportés.

16 Août 1944

Nombreuses visites toute la journée : Carrat, Beck, le docteur Ganimède.

Dans la nuit sont partis:

1 peloton de guérilla du 5ème escadron au pont du Martinet sur la N 531,

1 peloton de guérilla du 1er escadron (Aspirant Lanfranchi), et

1 peloton de guérilla du 7ème escadron (Sénégalais avec l’Aspirant Louis Rose) à Peyrins sur la N 538, l’ensemble du dispositif sous les ordres du Capitaine Bourgeois.

Le peloton Charvier reste en réserve car on nous signale une colonne allemande se dirigeant de Grenoble sur Romans (?).

Les renseignements sur le train de Saint-Marcel arrivent et l’affaire semble chose faite.

Le défaut de bombes incendiaires nous oblige à prévoir des bouteilles d’alcool en remplacement de l’essence introuvable. Quel en sera le résultat ? Il semble que la garde de ce train soit d’environ 30 hommes. C’est le Sous-Lieutenant Bagnaud qui est chargé de l’affaire avec 1 peloton de guérilla, son escadron (5ème) et 1 peloton de protection du 2ème escadron.

L’action doit se déclencher cette nuit vers 2 heures.

En même temps, sont prévues deux embuscades :

l’une par le 7ème escadron (Sénégalais avec l’Aspirant Louis Rose et l’Aspirant Vilchèze) à la Jonchère sur la N 531, et

l’autre par le 2ème escadron sur la route de Rochefort Sanson à partir de 1 heure le 17 pour protéger la retraite des éléments ayant opéré à Saint-Marcel, en cas de poursuite de l’ennemi.

En plus, entre La Motte-Fanjas et Saint-Thomas, le peloton Vigne du 1er escadron est envoyé en mission normale de guérilla.

Espérons que nous aurons plus de chance qu’hier et que les “chleuhs” circuleront un peu plus.

L’Aspirant Charvier fournit un rapport sur les agissements du chef des équipes civiles de Saint Julien en Quint.

L’Aspirant Perrier du 4ème escadron (Grange) rejoint vers 18 heures avec son peloton. En passant à Chabeuil il a fait deux prisonniers dont un a été tué au cours du voyage de retour pour avoir fait preuve de mauvaise volonté: le deuxième, le caporal d’aviation Geyer né à Yedern près de Francfort-sur-le-Main, marié, 2 enfants, a été interrogé par un groupement d’officiers du 11e Cuirassiers. Les quelques renseignements qu’il donne semblent assez douteux : il fait partie d’un atelier de réparations de lignes téléphoniques, stationné à Malissard, à l’effectif de 50 à 60 hommes. Il sera exécuté demain matin.

17 Août 1944

2h Attaque du train chargé de matériel, près de la gare de Saint-Marcel. Effectif :

1 peloton escadron Bagnaud pour l’attaque,

1 peloton escadron Jury pour la protection,

l’ensemble sous les ordres du Lieutenant Bagnaud. Faute d’explosifs et d’essence, le train ne brûle pas. Résultat : 25 Allemands tués, 2 blessés légers chez nous.

2h Mise en place de l’embuscade du 7ème escadron (Sénégalais avec l’Aspirant Louis Rose) sur la N 531. Heure de rentrée 5h30.

R.A.S.

2h30 Mise en place de l’embuscade du 2ème escadron à Rochefort Sanson. Fin de l’embuscade 5h30.

R.A.S.

5h30 Mise en place de l’embuscade Vigne (1er escadron) sur la N 531 entre la Motte-Fanjas et Saint-Thomas. Fin de l’embuscade à 21h R.A.S.

18 Août 1944

5h30 Départ d’un peloton Grange pour le col du Rousset/

5h30 Mise en place de deux pelotons du 3ème escadron sur la N 7 aux environs de Tain, sous les ordres de l’Aspirant Seguin. Embuscade réussie : 8 camions détruits, de nombreux tués; pas de perte de notre côté. Rentrée des deux pelotons à 18 heures.

5h30 Exécution du sieur Pirrazio et de son fils à Saint-Nazaire.

5h30 Un groupe du 1er escadron est placé en embuscade à Charpey. Fin de l’embuscade à 9 heures. R.A.S.

10h Mort du Sous-Lieutenant Freyssinat à l’hôpital de Saint-Marcellin, des suites d’un accident par imprudence (balle dans le ventre).

22h Mise en place d’un peloton du 1er escadron sur la D 9 au carrefour de Guimandet pour une embuscade de nuit. Fin de l’embuscade à 4h30. R.A.S.

19 Août 1944

5h30 Mise en place de deux pelotons du 3ème escadron sous les ordres de l’Aspirant Seguin sur la N 7 entre Tain et Saint-Vallier. Mission réussie : véhicules détruits, nombreux morts.

5h30 Mise en place d’un peloton du 7ème escadron (Sénégalais avec l’Aspirant Louis Rose, relevé à 8 heures par l’Aspirant Vilchèze) sur la N 531 à l’Ecancière. Fin d’embuscade à 21 heures. R.A.S.

8h Rentrée de l’embuscade sur la N 532 au pont sur l’Herbasse:

1 peloton du 5ème escadron, et

1 peloton du 4ème escadron sous les ordres du Lieutenant Grange.

La mise en place avait été faite à 1 heure. R.A.S.

23h Embuscade de nuit sur la N 7 par un peloton du 5ème escadron. R.A.S.

5h30 Embuscade de jour sur la N 7 entre Serres et Ponsas par deux pelotons du 1er escadron sous les ordres du Capitaine Bourgeois; vers 11 heures attaque d’un convoi : véhicules détruits (1 camion, 3 V.L.) environ 30 tués et 20 blessés.

Pas de perte chez nous.

20 Août 1944

5h30 Embuscade de jour à Peyrins sur la N 538 par un peloton du 2ème escadron. Fin d’embuscade à 20 heures. R.A.S.

5h30 Embuscade de jour sur la N 531 à l’Ecancière par un peloton du 7ème escadron (Sénégalais avec l’Aspirant Louis Rose).

Fin d’embuscade à 20 heures. R.A.S.

5h30 Embuscade de jour sur la N 7 entre Tain et Ponsas; effectif : deux pelotons du 4ème escadron sous les ordres du Capitaine Grange. Véhicules détruits, tués, nombreux blessés.

Rentrée des pelotons à 15 heures.

21 Août 1944

5h30 Embuscade de jour sur la N 7 entre Serves et Ponsas, effectif: deux pelotons du 5ème escadron sous les ordres du Capitaine Bagnaud. Véhicules détruits, tués, nombreux blessés.

Pas de perte chez nous

5h30 Embuscade de jour sur la N 7 à Tain par deux pelotons du 4ème escadron sous les ordres du Capitaine Grange. Véhicules détruits, tués.

Pas de perte chez nous. Fin de l’embuscade à 17 heures.

5h30 Embuscade de jour sur la N 538 à Peyrins par un peloton du 6ème escadron.

Fin d’embuscade à 21 heures. R.A.S.

22h Embuscade de nuit sur la N 7 par deux pelotons du 3ème escadron.

Fin d’embuscade à 5 heures. R.A.S.

22 Août 1944

5h45 Mise en place des éléments du 11e Cuirassiers sur les routes menant à Romans en vue de l’attaque de la ville.

9h30 Départ de l’attaque. Dispositif : partant de Mours les 2ème, 6ème et 7ème escadrons, le 7ème étant les Sénégalais; partant de la route de Grenoble le 1er escadron.

10h Attaque du garage Citroën après un accrochage sur le passage à niveau de la route de Mours par les éléments Fayard et les Sénégalais.

10h Attaque du collège et de la caserne par les 1er, 2ème, 5ème et 7ème escadrons (le 7ème étant l’escadron de Sénégalais).

13h30 Fin de l’attaque. Bilan, pertes ennemies : 35 tués et 109 prisonniers; pertes amies : 1 officier et 5 hommes tués; l’officier tué est le Lieutenant Lyssandre.

23 Août 1944

Ordre est donné d’arrêter les pillards et de les fusiller sur place.

Le nommé Morgant est fusillé sur la place Jacquemart et le corps est exposé.

7h Le Capitaine Fayard se porte à Mours et y établit un bouchon avec son escadron.

24 Août 1944

Mise en place des dispositifs de sécurité autour de Romans et de Bourg-de-Péage.

18h52 Les unités disponibles du 11e Cuirassiers doivent se trouver à Alixan à 19h30.

18h54 Le Capitaine Bourgeois est prévenu ainsi que le Capitaine Moine.

18h55 Le Capitaine Grange est prévenu.

19h19 Le Capitaine Fayard reste sur place et renforce ses défenses.

19h24 Ordre au Capitaine Bagnaud de garder les ponts par suite du manque de moyens de transport.

19h26 L’escadron Moine reste à la disposition du Commandant Thivollet (7ème escadron de Sénégalais).

19h45 Arrivée à Alixan du Capitaine Modot puis des diverses unités.

Effectifs : Bourgeois 85, Grange 80, Marchand 60, Jury 70, Piron 40. Installation des éléments en bouchon autour d’Alixan.

25 Août 1944

4h Ordre du Commandant Legrand à Capitaine Modot : se cantonner autour d’Alixan en attendant.

10h55 Ordre du Commandant Thivollet : retour sur Romans.

11h05 Départ sur Romans.

11h25 Arrivée.

14h Installation du P.C. villa Arnoux.

26 Août 1944

7h30 Visite des positions Grange et Fayard.

14h Mise en place des 6ème et 10ème escadrons sur de nouvelles positions, à Jabelin et au pont de la Vernaison.

27 Août 1944

8h Visite des positions Fayard.

13h15 Des chars allemands sont signalés sur la route de Tain à Romans.

13h17 1er coup de canon dans Romans. On essaie de toucher les unités par téléphone et on réussit à les alerter.

13h30 Repli du P.C. sur Pizançon. Les éléments du Capitaine Gérard Marchand sont alertés directement.

14h Le P.C. est installé à Meymans au Bois Vert. Canonnade et fusillade dans Romans.

15h Incendies (5) dans Romans.

15h30 Arrivée du 5ème escadron au P.C.

15h50 Le Capitaine Gérard Marchand arrive au P.C. Le Capitaine Jury a pu décrocher du collège et s’est installé au barrage de Pizançon.

16h30 Le Capitaine Moine est installé à 2 km Ouest de Pizançon.

? Envoi d’une liaison moto à Grenoble. Des éléments isolés rejoignent le P.C.

21h Liaison du Commandant Legrand.

22h Les éléments des 2ème et 3ème escadrons (Pizançon) quittent les positions et prennent les bois.

28 Août 1944

Accalmie des batailles dans Romans et baisse des incendies.

3h30 Retour de la liaison Grenoble – Moirans moto.

12h Colonel Hervieux au P.C.

15h15 Départ du Sous-Lieutenant Chazalon avec une camionnette pour le P.C. américain de Moirans. Mission : rapporter des munitions.

17h Alerte :1 char, 1 A.M. et des éléments d’infanterie donnent l’assaut du P.C. Ordre de repli sur la Baume-d’Hostun.

21h Arrivée au P.C. de la Baume.

21h30 Reconnaissance des corps du Capitaine Paquebot et de M. Boiron à la sortie de Saint-Nazaire. Un corps a été trouvé à demi emporté par un obus de 75 (Montanet). La voiture de M. Boiron est carbonisée. Paquebot et Boiron reposent côte à côte; ils ont été tués après avoir abattu un nazi; leur voiture avait franchi le barrage allemand; ils sont tombés sur une patrouille ennemie.

22h Ordre d’alerte donné à Bagnaud, Jury et Gérard Marchand – mission : organiser la défense du défilé de Saint-Nazaire.

29 Août 1944

3h Retour du Sous-Lieutenant Chazalon avec les ordres du P.C. américain du colonel Davidson.

Les Américains doivent attaquer Romans ce matin. Les F.F.I. de la région sous le commandement du Commandant Thivollet doivent aider la progression américaine.

7h Activité de l’aviation américaine sur Romans.

9h Tir de réglage de 155 sur cité Nadi, route de Saint-Paul, route de Génissieux autour de Romans.

9h20 Violent bombardement par salves de 20 coups.

11h15 Reconnaissance du corps du cavalier Montanet tué à Saint-Nazaire par un obus de 75 de plein fouet. Mise en bière du Capitaine Paquebot, de M. Boiron et de Montanet. Les corps sont inhumés à la Baume-d’Hostun.

11h30 Rentrée du motocycliste Dédé. Ont disparu à Saint-Nazaire : Goep et Vilatte du 1er escadron.

14h15 Liaison du Lieutenant Chardigny.

15h30 Déplacement du P.C. de la Baume-d’Hostun sur Bois Vert.

16h45 Reconnaissance du moulin, P.C. du Capitaine Jury, puis de l’observatoire Nord-Est de Papelissier.

Un char américain est à l’aplomb du terrain de l’aviation ainsi que des éléments d’infanterie américaine à l’arrêt.

Progressions des barrages d’artillerie.

19h15 L’observatoire repéré essuie un tir assez violent de 77.

Pas de perte.

19h30 P.C. à Meymans.

Le groupe Georges 43 met à la disposition du 11e Cuir un canon de 25 mm avec 200 coups et des munitions de F.M.

Ordre donné au Capitaine Jury de pousser une patrouille à Pizançon.

19h40 Liaison du Sous-Lieutenant Raymond au P.C. Davidson à Saint-Paul.

23h Sous-Lieutenant Chazalon en liaison au P.C. à Montclar puis au P.C. du Colonel Steel commandant le 141e régiment d’infanterie américaine à Crest, puis Chabeuil.

30 Août 1944

9h Liaison de l’Adjudant-chef Valère du service auto : son service est installé au château de Marmais.

Pas de perte de matériel.

Arrivée du Sous-Lieutenant Chazalon qui a pris liaison avec le Colonel Steel du 141e. Les Américains de Steel qui attaquent Bourg-de-Péage par le Sud ignoraient que Davidson attaquait Romans depuis 24 heures par l’Est ??

10h15 Arrivée des escadrons Gérard Marchand et Bourgeois aux alentours de Meymans.

12h30 En liaison avec les unités américaines, les unités accélèrent le mouvement sur Bourg-de-Péage et Romans.

Installation du P.C. chez Lacour où nous retrouvons nos archives dispersées, mais intactes.

16h Reconnaissance dans Romans et Bourg-de-Péage. Mise en place des unités et organisation de patrouilles pour éviter le pillage.

31 Août 1944

Organisation des unités dans Bourg, Romans et Mours.

Continuation des patrouilles et opérations du maintien de l’ordre.

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