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JOURNAL DE MARCHE DU 11è REGIMENT DE CUIRASSIERS
JUILLET 1944
20 Juillet 1944
18h De Romans : 3.500 nazis viennent de quitter Romans armés de mitraillettes; partis en camion il y a 20 minutes
18h15 20 camions à l’Ecancière en direction de Saint-Nazaire; 20 camions à Barbières en direction de Léoncel.
23h15 à St-Nazaire : 800 nazis, à Saint-Just-de-Claix : 200 nazis. Contrairement aux bruits qui avaient courus, les nazis ne réquisitionnent pas les récoltes. Glénat a passé avec un camion de blé. Légère action contre Sabatier. Le peloton Freyssinat a été envoyé en renfort de Sabatier. Un groupe envoyé sur Pont de Manne n’a rien vu (Fayard).
23h30 Bourgeois : les nazis sont en contact avec Freyssinat à l’est de St-Nazaire; ils pillent la ville. A Saint-Jean, néant.
23h40 C.R. de Roland : une partie du peloton Freyssinat à Saint-Nazaire; l’action semble réussir Un groupe de Seguin est parti depuis 18h40 au saut de la Truite avec mission d’interdiction, or du Pionnier à la Truite il y a 3 heures de marche, donc pas de C.R. possible avant 1h30 le 21.
23h50 Grange : les signaux morse déjà repérés hier continuent. On a pu traduire une fin de message qui est “Comme convenu”. Grange lance des patrouilles pour rechercher l’origine.
23h55 Hardy : Charvier est à Fond-Payanne. Patrouilles à Fond d’Urle et Pas de l’Infernet.
21 Juillet 1944
0h45 Grange : les patrouilles envoyées à 23h50 reviennent. Les signaux envoyés sont en direction de l’intérieur du Vercors et doivent être reçus dans l’alignement La Chapelle – Loscence car il y a réponse dans la direction de cette ligne
Rien n’a pu être traduit, la patrouille ignorant le morse.
Le 2ème bureau prévenu immédiatement a déclaré qu’il envoyait une patrouille.
1h05 Fayard : dans la soirée un groupe du 14e BCA s’est approché de St-Nazaire mais a été arrêté par les feux de mitrailleuses.
Ce sont les F.T.P. de Roche Chinard qui ont pris le contact à Saint-Nazaire mais se sont repliés de suite.
C’est alors que Sabatier a pris contact à son tour. Il semble que les nazis se retirent vers Saint-Marcellin (?). Sabatier a deux blessés.
1h40 Un renseignement venant de Michel (René) signale qu’une attaque est prévue pour 4 heures sur Léoncel.
2h15 de Hervieux à Thivollet : prévenir Grange d’avoir à envoyer à Menée, en renfort, une partie de l’effectif civil de la défense de Chamaloc.
3h30 de Hervieux à Grange sous couvert de Thivollet : veuillez faire préparer une section de Grange pour aller en renfort à Corrençon.
9h30 Parachutistes lâchés sur Vassieux. Téléphone coupé après avoir communiqué que la défense du terrain avait été inefficace, que le Capitaine Paquebot était blessé et le Capitaine Hardy tué probablement.
De 10h à 15h Des pelotons sont lancés sur Vassieux pour reprendre le terrain. Ils sont cloués aux lisières du terrain par l’aviation et les mitrailleuses des nazis installés à La Mure et Vassieux. Questions diverses réglées directement par téléphone.
16h André : toutes les défenses des Pas tiennent bon. Accalmie depuis 1 heure. Pertes nazies certainement importantes par nos F.M. Nazis toujours en position. Je demande un peloton de réserve à cause du danger des parachutistes sur la Grande Cabane, ou au moins un G.C. pour renforcer Pas de la Ville. Je demande également 2 mortiers. Liaisons très difficiles. Ai laissé liaison à Pré Grandu.
16h10 En réponse, l’ordre suivant est donné : se méfier des parachutistes. Tenir les Pas coûte que coûte. Garder le contact avec l’ennemi même en cas de repli. Profiter de toute accalmie pour contre-attaquer et rejeter les nazis en bas des Pas.
16h20 Le Capitaine Rolland (Drôme) signale une colonne nazie montant sur Izeron.
16h30 Arrivent à Izeron.
16h32 La cabine téléphonique d’Izeron ne répond plus.
16h20 C.R. de la situation au Plateau de Beurre : R.A.S.
16h20 Renseignement anonyme : le Lieutenant X arrive de Chichilianne et a pris liaison Pré Perdu et Pré Cabane. 2 000 nazis entre Vif et Clelle.
17h35 Renseignement de la plaine : entre Saint-Just-de-Claix et Tullins, beaucoup de troupes dont 2 canons de 155 tractés. Sainte-Eulalie et Pont-en-Royans ne sont pas bombardés. Les concentrations les plus importantes se trouvent dans la moitié Sud.
18h Patrouilles nazies au Pont de Manne.
18h Une section de Fayard avec un officier, 10 hommes et A.A sont. envoyés en renfort à André. Celui-ci se trouve sans aucun ravitaillement.
19h30 Les Pas tiennent toujours.
19h50 Lieutenant André à Commandant Thivollet : je reviens du Pas de la Ville avec le Lieutenant Henry. Préparation d’artillerie assez considérable sur Pas de la Ville. Il semble que les nazis concentrent leurs efforts sur ce Pas. Autres Pas calmes.
Il m’est indispensable d’avoir 3 mitrailleuses et 1 mortier si possible (pour le Pas de la Selle). J’attends avec impatience le renfort signalé.
19h55 Du col du Rousset : Grange est en reconnaissance sur Vassieux La ferme Juillet brûle (?).
D’après le C 18, les nazis n’ont pas rencontré de résistance et ont occupé Vassieux. Hardy tué probablement. Le C 15 tient Fond Payanne.
20h A 18h30, les nazis ont bombardé Saint-Jean par l’artillerie de Saint-Just-de-Claix. A 18h45 la même artillerie bombarde Pont-en-Royans. A 19h05 l’aspirant Seguin a rendu compte de ce que la route du Saut de la Truite a sauté et est totalement impraticable. L’un de ses groupes est à la recherche des parachutistes lâchés sur Vassieux.
21h15 de Hervieux à Thivollet : instructions pour la suite des opérations. De Vassieux : l’attaque contre les parachutistes est engagée par Grange et Bagnaud. Leurs unités arrivent au contact dans les premières maisons du village au Sud-Est. Les pelotons qui attaquent au Nord et au Nord-Est n’arrivent pas.
Le Capitaine commandant le commando américain donne l’ordre de repli à Grange et à Bagnaud sans avoir pris lui-même une grosse part à l’action.
Le 21, à partir de 23 heures, la situation semble être rétablie partout. Les nazis sont retranchés dans Vassieux et La Mure. Les Pas tiennent bon. Le 3ème escadron (Roland) envoie un C.R. le 22 au matin disant que la nuit a été calme dans son secteur.
Son dispositif est le suivant :
P.C. ferme Grenier
1er peloton (Freyssinat) sur Vassieux par le col de Lachau
2ème peloton (Gaston) idem
3ème peloton (Seguin) 1 G.C. au col de la Roma
1 G.C. au Saut de la Truite
1 G.C. au col du Pionnier
4ème peloton (Raphaël) à l’Echarasson.
22 Juillet 1944-
1h40 Le Capitaine Nicolas (Génie) prend le commandement du P.C. de Saint-Agnan et demande des ordres.
Son effectif est d’environ 20 hommes et 3 F.M., formé par des récupérés de différents services tels que Génie, Intendance, Transmissions.
1h40 Le Capitaine Bourgeois annonce que son peloton de recrues et son canon de 25 partent dans 15 minutes.
2h50 Le Sous-Lieutenant Raoul qui avait été envoyé la veille au soir sur les Pas de l’Est, demande l’installation pour 6 heures d’un fil téléphonique entre Pré Grandu et la Grande Cabane.
5h Du Rousset on annonce que les nazis ont dépassé Châtillon et Pré Péret.
à 6h ils sont à Châtillon et à Pontaix.
6h Un rescapé de Vassieux (Hermine) du 2ème escadron communique qu’à Vassieux les nazis ont fusillé tout ce qui était vivant (militaires et civils). Toujours sans nouvelles du Capitaine Hardy et de son escadron (à part de très légers éléments). La ronde des avions continue sur tout le Vercors. Bombardement intensif de Vassieux et de la région, de La Chapelle qui flambe. Bombes et mitrailleuses sur presque toutes les routes; circulation et liaisons très lentes pour ces raisons.
7h20 Le Lieutenant Raoul (hôpital) téléphone du Rousset, que l’évacuation de l’hôpital sur Die est rendue impossible par suite de l’avance des nazis dans le Diois (5 km de Die) et qui viennent de Châtillon. Tout va bien mais les blessés sont obligés de remonter sur le Plateau.
Dans la matinée (9 heures ?) un C.R. du Capitaine Fayard donne les précisions qui suivent : pas d’Allemands sur le Musan et la Sieurle. Les otages pris par eux à Roche-Chinard ont été évacués en même temps que les troupes qui ont quitté cette localité.
Le groupement Sabatier est installé au Nord de Tamée et fournit des patrouilles. Le Commandant Legrand et le Capitaine René demandent 3 sections de renfort pour tenir la vallée d’Oriol. Le 14e B.C.A (Fayard) a passé la nuit sur ses positions de combat et a patrouillé sans aucun accrochage. Il couvre ses arrières au col de Carri sur la route de Lachau et au col de l’Echarasson.Impossible de renforcer le groupe Sabatier étant donné l’étendue de son front.
8h Les Pas de La Ville et de Berrière tiennent.
Une contre-attaque qui doit se déclancher par derrière les crêtes se prépare.
9h30 De l’Aspirant André : un de ses A.T. a été blessé au Pas des Chattons par des coups de feu venant du Grand Veymont.
Le Pas des Chattons subit une grosse attaque. Des renforts sont demandés d’urgence.
10h15 60 hommes du Q.G. et une Compagnie (Philippe) partent en renfort sur les Pas sous le commandement du Commandant Georges.
10h30 Le Capitaine Nicolas est envoyé en direction de Le Château avec 30 hommes et 4 F.M. Il doit s’y porter par le col du Pas du Pré.
11h30 Le col du Rousset annonce que le Pas de la Selle n’est pas traversé, la Grande Cabane a été bombardée mais pas occupée contrairement aux bruits qui avaient couru. Il est à remarquer que certainement de nombreux agents de l’ennemi ont profité de la mobilisation des pourtours du Plateau pour s’infiltrer dans les unités et les services. Des bruits fantaisistes circulent et émanent très souvent des bureaux du Q.G. et de l’E.M. qui sont directement avisés par téléphone par des parleurs inconnus.
11h40 Le Capitaine Bourgeois est désigné pour prendre le commandement des forces qui doivent attaquer Vassieux à partir de 12h45. L’unité du commandement est ainsi réalisée dans ce secteur constamment pilonné par l’aviation ennemie qui déploie une grande activité sur la région.
12h35 Fait assez bizarre, bombardement intense de toutes les lisières de Vassieux, par 8 appareils ennemis (il est à remarquer que l’attaque était prévue à 12h45).
12h15 Le Capitaine Bourgeois a reçu l’ordre d’attaque. Le manque de liaison et les distances entre unités l’obligent à différer l’attaque pour 21 heures ce soir. Les renseignements sur les Allemands semblent confirmer que 6 ou 7 planeurs ont atterri dans la matinée sur le terrain. En outre, un avion sanitaire arrivé le matin n’est pas reparti mais un Fiescher-Sterch assure la liaison Vassieux-La Mure (2 km).
Les parachutistes et les aéroportés sont retranchés dans ces deux villages et avec l’appui des avions interdisent toute progression dans ces deux directions.
12h35 Tirs d’artillerie et d’avions sur les Pas. Demande de renfort. Les forces qui tiennent les Pas ont contre-attaqué et progressent vers les rochers du Pas de l’Aiguille. Dès que le renfort arrivera une manœuvre de débordement sera tentée par le Veymont pour dégager le Pas des Chattons. Les Pas au Nord du Veymont tiennent bon malgré un état physique très déficient des hommes.
Il est à remarquer que cette déficience est du reste générale. Depuis 36 heures les hommes sont sous une pluie persistante sans aucun couvert et le ravitaillement n’est assuré par l’Intendance qu’avec une parcimonie regrettable. Le pain est très rare car les boulangers de La Chapelle ont cessé la fabrication.
13h20 Au Pas de la Selle, les sections Potin et Lacombe sont en contact et les renforts toujours pas arrivés.
13h50 C.R. d’André expédié à 3h55 par un agent de liaison moto (nègre) qui ayant peur des avions est venu à pied.
16h Transmis par Colonel Hervieux un C.R. du Capitaine Fayard sur l’activité de sa Compagnie dans son secteur de l’Echarasson.
16h La Chapelle est bombardée : 2 points de chute sans grande casse, point de blessés ou de tués.
17h30 Le Commandant Georges est arrivé avec ses renforts à Pré Grandu.
18h30 De Sous-Lieutenant Raoul à Capitaine Modot : envoyer d’urgence une dizaine d’hommes et 2 A.A. pour soutenir Potin en difficulté au Pas de la Selle devant forces considérables de l’ennemi. Attend réponse.
19h05 De Pré Grandu : T.V.B. à l’Est.
21h30 Le signal de l’attaque sur Vassieux (3 coups de 25) n’est toujours pas perçu.
Aucune nouvelle de ce secteur. L’aviation continue à bombarder et à mitrailler.
20h25 Le Sous-Lieutenant Raoul signale que le Pas de Bérièvre n’est tenu que par 5 hommes et le bombardement commence avec assez d’intensité. Renforts d’urgence demandés, or nous n’en avons aucun de disponible.
20h30 1 blessé est annoncé de Pré Grandu, à diriger sur l’hôpital. Le Docteur Jean-Pierre est prévenu.
21h20 Le téléphone est coupé avec Lente car Saint-Jean ne répond plus. Bombardement possible par canon.
21h25 Les trois maisons à l’Ouest de la côte 1085 (840-896) qui soit disant sont occupées par les Allemands, sont enlevées par l’escadron Bourgeois; sans perte.
21h30 Le Capitaine Allen téléphone au col du Rousset : malgré tous les efforts, la défense de Châtillon a été insuffisante.
La route est libre. Le P.C. du bataillon se replie vers le Sud suivant directives du Commandant Legrand.
Je vous communique qu’une colonne de 200 mulets et d’infanterie de montagne se dirige de Chichiliane sur le Vercors.
21h40 De l’escadron Grange, C.R. journalier : un peloton parti ce matin n’est pas rentré;
La mission américaine attendue au col Saint-Alexis n’a pas pris contact; cet après-midi un peloton parti en patrouille pour battre la forêt entre la Nève et la plaine de Vassieux n’a rien vu.
2 groupes sur 4 ne sont pas encore rentrés; tous les hommes sont très fatigués.
22h20 Le Q.G. nous communique : les Pas de la Ville et de Berièvre sont enfoncés et 2.000 Allemands sont sur le plateau de la forêt domaniale (??).
22h25 Après avoir demandé à Pré Grandu confirmation du message ci-dessus on nous téléphone : T.V.B. sur les Pas; légères infiltrations en voie de nettoyage.
Le Lieutenant Henry affirme que si les Pas n’avaient pas tenu on serait déjà averti. Les renforts ont été envoyés aux endroits menacés et pour l’instant l’action a l’air de tourner à notre avantage malgré la lassitude physique de nos hommes.
Nous faisons une enquête rapide pour savoir d’où vient un renseignement aussi invraisemblable et à 22h45 le col du Rousset annonce que ce message du Q.G. vient d’un rapport de l’Aspirant Perrier (Pas de Chabrinel) qui le tient du Commandant du Pas de la Bérièvre (Picard) qui lui-même aurait vu de nombreux Allemands à la Maison de Beguère (?)
22h40 Le Pas de la Selle est forcé (message non confirmé).
23h20 Confirmation du précédent : les Allemands occupent le Pas de la Selle et descendent sur Chabrinel pour opérer la jonction avec les colonnes montant de Die.
23h30 Ordre à Grange d’envoyer d’urgence un peloton à Pré-Grandu pour aller barrer la route de la Grande Cabane vers la fontaine de l’Adret.
23h40 Ordre à Lieutenant Henry : ramassez tous vos hommes, la section de Fayard qui monte en renfort sur le Pas de Chabrinel avec officiers et 10 hommes sont à diriger d’urgence sur le Pas de la Selle.
23h45 C.R. du Capitaine Bourgeois donnant les raisons du non déclanchement de l’attaque de 21 heures sur Vassieux.
23 Juillet 1944
0h30 Sous-Lieutenant Raoul donne comme renseignement contrôlé que T.V.B. sur les Pas.
1h05 Le Capitaine Nicolas n’ayant pu établir de liaisons avec Le Château revient à Saint-Agnan avec ses hommes sans avoir reçu l’ordre de repli.
1h20 Vers Vassieux de nombreuses fusées éclairantes sont lancées par les Allemands.
vers 2h15 Mortiers, rafales de F.M. vers Vassieux (observation du PC).
2h35 La Britière annonce que des rafales semblent provenir des pentes au-dessus des Chaberts (entre Vassieux et route du col du Rousset).
2h45 à 7h15 R.A.S. Quelques questions secondaires sont réglées directement par téléphone.
7h30 Le Lieutenant Vigne fait relever 20 hommes du Capitaine Bourgeois par le peloton Cros stationné aux Baraques, car les Goulets ne semblent pas menacés directement.
Nous ne possédons plus aucune réserve tactique et les unités au combat sont en position dans des circonstances très pénibles depuis 48 heures. Ravitaillement presque inexistant : les unités qui ont voulu toucher des vivres se sont heurtées aux portes fermées et se sont entendues répondre que l’intendance était supprimée. Question qui sera réglée avec l’E.M. dans le courant de la journée.
8h30 Grange revient de Vassieux. L’attaque sur Vassieux déclanchée quand même vers 2 heures a échoué par manque de coordination dans les mouvements.
8h35 3 planeurs atterrissent au col de Marignac; 1 planeur semble avoir percuté sur les rochers de Chirenne.
8h45 Ordre à Grange d’envoyer un de ses pelotons frais (?) sur Vassieux (S.E.) pour relever les gens de Bagnaud.
9h50 La relève du peloton Cros (aux Baraques) est faite.
10h 1 ou 2 avions porteurs de troupes tournent sur la vallée. Conseil est donné à l’E.M. de se méfier des parachutistes sur le terrain de Saint-Martin.
10h30 L’E.M. de Saint-Martin est mitraillé.
11h Vu l’impossibilité de progresser sur Vassieux, par suite de l’aviation, les escadrons Grange, Bagnaud, Bourgeois et Rolland sont relevés de leurs positions. Les hommes sont très fatigués. Les initiatives de l’intendance ont été et sont nulles. Les hommes de Bagnaud rentrent à La Rivière. Les commandants d’escadrons sont convoqués au P.C. pour 11 heures. Restent en position : le peloton Cros, 2 sections Arnold, la section Nicolas, la section de discipline et le groupe Jury.
Ils sont placés autour du terrain de Vassieux – La Mure en observation pour se rendre compte de l’arrivée de nouveaux planeurs ou avions.
12h Au cours de la réunion des chefs d’escadrons, ceux-ci sont avertis de se tenir prêts à la dispersion dès que l’ordre arrivera de l’E.M. ainsi que le Colonel Hervieux nous a averti dans la matinée. Cet ordre est motivé par l’aggravation de la situation en zone Nord (Commandant Durieu). En effet à Corrençon les nazis attaquent les positions avec 6 ou 8 bataillons. Valchevrière est tombé et les nazis progressent dans la direction d’Herbouilly.
15h Les premiers obus venant du plateau d’Herbouilly tombent sur Saint-Martin. Depuis 14 heures, vains appels téléphoniques avec La Britière pour avoir des renseignements sur les Pas et Pré Grandu. On signale de source inconnue que les nazis descendent les pentes vers Saint-Agnan. Reconnu faux par la suite.
Le col du Rousset signale 400 camions, des chenillettes, 3 chars de 30 tonnes montant vers le Rousset. D’autre part une colonne partie de Chamaloc escalade les rochers de Chirenne pour attaquer le col de Vassieux et tourner le Rousset.
Ordre est donné à Scarone (cycliste) d’aller au parc à munitions des Chabottes pour se rendre compte du matériel d’armement disponible. Il revient avec une liste de matériel existant et non distribué par le Lieutenant Octave.
L’ordre de dispersion arrive de l’E.M. vers 15 heures. Chargement des véhicules du P.C., évacuation des locaux, camouflages et enterrement des deux containers de films (connaissent la place exacte : Aspirant Raymond Rose, m.d.l. Pierre Durand, cavaliers Scarone et André Gabayet.
Vers 17h Départ de La Rivière
Itinéraire suivi : Saint-Agnan, La Chapelle (charbon de bois chez Périllat), la Cime du Mas, col de Carri, route de Lente, Domaine de Lente.
Là se trouvent : le Capitaine Roland, le Sous-Lieutenant Bagnaud, le Capitaine Bourgeois, le Capitaine Paquebot (rescapé de Vassieux avec une balle à l’oreille droite, une qui effleure la tempe gauche et la cheville gauche cassée), Monsieur Boiron et le chauffeur du tracteur du terrain de Vassieux. Ceux-ci nous narrent très succinctement les crimes commis par les nazis dans ce village. Ils révèlent aussi que ceux-ci possèdent des lance-flammes et que ces engins n’avaient été dévoilés qu’au dernier moment de l’attaque que nous avions prévue.
Le Capitaine Roland nous confirme les mouvements de ses unités pour l’attaque de la veille au soir : dès 23h30 le peloton Freyssinat était prêt et progressa jusqu’à 200 m. au Nord-Ouest de Vassieux en coopération avec l’attaque du Sud et de l’Est. La puissance de feu déployée par l’ennemi enraya toute progression et l’état physique des hommes qui, sous la pluie et sans manger, se trouvaient depuis 48 heures pilonnés par l’aviation empêcha que leur valeur combative se manifeste entièrement. Après délibération le P.C. décide de se porter à Pellandré alors que les unités se cantonnèrent dans le secteur compris entre le col de l’Echarasson au Nord, la route de l’Echarasson-Taillebourse à l’Est et la falaise à l’Ouest.
Au cours du voyage, rencontre avec le Capitaine Fayard qui déclare qu’au reçu de l’ordre de dispersion il en a fait assurer l’exécution.
Arrivée à Gauthier vers 22 heures après avoir camouflé les voitures vers l’entrée du chemin. Avons dirigé sur leur unité quelques détachements lâchés dans la nature. Couchons à Gauthier.
24 Juillet 1944
8h Installation à Pellandré. Ravitaillement presque nul. Des hommes isolés sont renvoyés sur leurs unités.
17h Un C.R. du groupe Vallier nous fait savoir que les Allemands ont quitté Saint-Jean-en-Royans et Léoncel et ont pris position à La Baume et à Saint-Nazaire. Un papier du Lieutenant Terrot au Commandant Hervieux renseigne sur la situation des Chasseurs du 6ème qui complètement démoralisés par la mort du Lieutenant Chabal et l’ordre de dispersion, errent sur le plateau. Le Lieutenant Terrot lui-même blessé n’espère plus pouvoir tenir le coup et va tâcher de rejoindre le P.C. de l’E.M.
25 Juillet 1944
Le Capitaine Roland vient rendre compte qu’une liaison du Lieutenant Freyssinat lui donne la position de tous ses pelotons : Freyssinat est au col de la Bataille où il a été envoyé avec son peloton par le Commandant Legrand; Seguin est à la ferme d’Ambel, Gaston est à Montuez.
Freyssinat a contacté le colonel Bayard, le Capitaine Lemoine et le Commandant Legrand qui ignorent tout de la situation.
Les Allemands sillonnent les routes de la forêt de Lente et de nombreux coups de feu sont entendus. Les fermes sont pillées, incendiées et souvent les occupants fusillés. Quelques patrouilles très prudentes envoyées dans plusieurs directions confirment la présence de l’ennemi presque partout.
Dans la nuit du 25 au 26 les puces nous empêchent de dormir, si bien que pour demain nous coucherons dans les bois au bord de la falaise du cirque de la Chartreuse de Bouvante. Le Lieutenant Moine rejoint avec son escadron Sénégalais.
26 Juillet 1944
Les unités commencent à se réorganiser et à se regrouper aux emplacements prévus. Le Lieutenant Jury prend le commandement d’éléments divers et reforme le 2ème escadron dont on est absolument sans nouvelles depuis Vassieux (sauf que le Capitaine Hardy a été tué, de même que Jacques Descour).
Diverses patrouilles envoyées donnent des renseignements confirmant la présence de l’ennemi partout.
Le Capitaine Fayard envoie un C.R. où il dit avoir avec lui environ 40 hommes; une de ses sections est au Musan (Loraly), une autre à Saint Martin le Colonel. Tout le reste de son unité est à sa disposition à la moindre convocation; la presque totalité de ses armes sont cachées. Tous ses chefs de section sauf un sont avec lui. Son ravitaillement est assuré et il lance des patrouilles sur le col de Lachau pour reconnaître l’ennemi.
27 Juillet 1944
C.R. de l’Aspirant Charvier, retour d’une patrouille sur Bouvante-le-Bas. Les Allemands ont apposé une affiche de mobilisation générale; ils ont un cantonnement à 2 km de ce pays et en font préparer un par le Maire de Bouvante. Ils ont menacé de tout raser s’il y avait un seul attentat contre eux.
Toujours pas de contact avec le Lieutenant Grange.
Un C.R. de Pierre (groupe Vallier) dit qu’on a pu retrouver le P.C. Hervieux aux environs de la ferme Graille. Le Commandant demande l’organisation d’un système de patrouilles sur Vassieux, La Chapelle et Saint-Martin (nous en sommes à 15 km et les Allemands sont partout ??).
Le Colonel Bayard et le Capitaine Lemoine arrivés hier au soir passent la journée au P.C. Le Colonel donne l’ordre, non pas de regrouper les escadrons, mais au contraire de pousser l’escadron Bagnaud à Loscence et l’escadron Roland sur la région de Vassieux. L’ordre s’exécute et les éléments des deux escadrons repartent aussitôt sans s’être regroupés ni refaits. L’intention du Colonel Bayard est de réoccuper le terrain le plus tôt possible et de foncer sur les colonnes ennemies passant sur les axes de l’intérieur du Plateau.
28 Juillet 1944
10h Départ du Colonel et du Capitaine Lemoine. L‘Aspirant Louis Rose envoyé en patrouille sur Loscence avec le m.d.l. Pierrot (Pierre Durand) à cheval, envoie vers 15 heures un C.R. qui indique :
1°) la Cime du Mas est brûlée, sauf une maison,
2°) La Chapelle est un monceau de ruines,
3°) aucune circulation sur les routes,
4°) quelques coups de feu éloignés sont perçus,
5°) un Allemand tout seul sur la route est vu, se dirigeant sur le col de Carri.
Le Commandant Geyer-Thivollet décide à 17 heures de se rendre lui-même à l’emplacement où se trouve l’Aspirant Louis. Il part à cheval avec le Capitaine Modot, les m.d.l. Yves Beeseau et Paulot (Paul Durand). Ils rentrent à 19h30 ayant seulement vu brûler la maison des Chasseurs à la May. R.A.S. pour le reste de la journée.
Nous couchons dans les bois à proximité d’un Pas reconnu et un peu aménagé par le Capitaine Modot et le Sous-Lieutenant Lyssandre.
Le Capitaine Paquebot est déjà descendu à l’abri dans une grotte de la falaise.
29 Juillet 1944
Le Commandant Legrand, de la Drôme, vient contacter le Commandant Thivollet, car d’après les ordres du Colonel Bayard, le département de la Drôme s’étend à notre secteur du Vercors. L’accord parfait est établi entre les deux Commandants et une indépendance presque absolue est laissée au Commandant Thivollet, étant donné les difficultés de liaison entre les deux P.C.
Le m.d.l. Yves envoyé en liaison entre le P.C. et le groupe Vallier (au carrefour Echarasson-cheminVignon) part à cheval; sa mission doit durer 45 minutes à peine. N’étant pas rentré au bout de 2 heures, une patrouille du 1er escadron vient rendre compte qu’elle a entendu un galop de cheval et des rafales. Effectivement le corps de Yves est retrouvé à côté de celui de son cheval : une embuscade d’Allemands était tendue et Yves tomba en fonçant dans le tas.
La surveillance est renforcée et les tirailleurs Sénégalais cerclent le secteur.
30 Juillet 1944
Vers 10h15 des coups de feu éclatent vers la maison de Pellandré et des cris se font entendre.
Les Allemands ont surpris les tirailleurs au seul endroit où la ligne présentait une solution de continuité.
La situation est vite rétablie et les Allemands sont repoussés un instant.
Ils ont surpris Jockey (Edouard Haes) qui était étendu dans un pré au-dessus de la maison; c’est lui qu’on a entendu crier lorsqu’il fut blessé à la cuisse, (achevé d’une balle dans la nuque alors qu’il était face contre terre – constatation faite à son enterrement). Nous décidons de nous replier et par le Pas les éléments du P.C. commencent à descendre sur la Chartreuse de Bouvante.
Une contre-attaque des Allemands leur coûte au moins deux tués et ils n’insistent pas, mais brûlent la grange de Pellandré.
Le Caporal SA Traore a été blessé dans le haut du bras (sans gravité). La descente sur la Chartreuse est très prudente et nous y arrivons vers 18 heures. Les vivres sont rares et la situation assez dangereuse; aussi nous allons passer la nuit dans les bois au Sud de la Chartreuse.
31 Juillet 1944
La journée se passe au même emplacement. Le Commandant Hervieux vient en liaison et contrairement aux ordres du Colonel Bayard, il entre dans les vues des Commandants Legrand et Thivollet et se rendant très bien compte de la situation, décide de laisser un large secteur à nos escadrons (de Romans à Saint-Marcellin toute la plaine). Ce n’est pas l’heure de tenir des positions comme le colonel Bayard le croit, mais de se réorganiser pour agir en guérilla dès que l’Allemand quittera le Plateau. Le Commandant décide de remonter sur le Plateau et vers 18 heures en route vers le Pas de La Rochette. Nous arrivons dans la soirée après une montée qui semble dure par le peu de nourriture prise depuis 5 jours. Le Capitaine Bourgeois installé à La Rochette envoie un C.R.de R.A.S. sur Gauthier.
Par les ordres donnés par le Colonel Bayard, deux de nos escadrons sont au loin et nous n’en avons aucune nouvelle. Des patrouilles lancées à leur recherche ne trouvent rien, sauf des Allemands qui s’infiltrent partout et quelques légers accrochages se produisent sans perte pour nous.
Un C.R. du Sous-Lieutenant Raphaël annonce qu’hier Lente a été attaquée, que le Capitaine Roland a été obligé de se replier sur le col de la Rama devant des infiltrations concentriques de l’ennemi; il croit qu’il a été encerclé et n’en a plus de nouvelle. Raphaël ne donne pas sa position actuelle et par suite il y a impossibilité de lui dire de rejoindre.
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